Carrière chirurgicale : Parcours et opinions des membres du département de chirurgie de l’UdeM

7 juin 2018

Pour aider les étudiants en médecine à orienter leur choix de carrière et leur parcours pré-résidence chirurgicale

Contexte

Au Québec, comme ailleurs dans le Canada, les places en résidence dans une discipline chirurgicale diminuent depuis quelques années. Selon les statistiques du Canadian Resident Matching Service (CaRMS), malgré un taux d’intérêt demeurant constant chez les étudiants, le nombre de positions dans une spécialité chirurgicale est passé de 327 en 2013 à 280 en 2018. D’ailleurs, au Québec, le ratio disponibilité par rapport à la demande est présentement à 0.40, signifiant qu’il existe 5 étudiants en médecine appliquant pour chaque deux positions en chirurgie. Ainsi, nombreux sont ceux désirant connaitre les démarches à entreprendre pour augmenter leurs chances de jumeler dans le monde compétitif de la chirurgie. Cependant, très peu de littérature existe présentement sur ce sujet. Ceci justifie donc la création d’un sondage fait auprès des chirurgiens et résidents pour mieux comprendre la réalité du processus d’application en chirurgie à l’Université de Montréal.

Résultats

Un sondage a été envoyé à tous les chirurgiens et résidents affiliés au département de chirurgie de l’Université de Montréal. Un total de 124 chirurgiens (24.3 %) et 91 résidents (44 %) y ont répondu. Durant leurs années en préclinique, 75 % des patrons et 57.5 % des résidents disent avoir obtenu des notes supérieures à la moyenne. À l’externat, la majorité des répondants ont fait plus de 6 semaines de stages électifs dans leur spécialité actuelle et plus de 12 semaines dans le domaine chirurgical. Durant leurs stages chirurgicaux, 86.5 % disent avoir performé au-dessus de la moyenne. Une majorité de participant étaient impliqués en recherche avant la résidence, soit 52.4 % des patrons et  82.4 % des résidents. Parmi les résidents, 48.4 %​ auraient présenté à un congrès scientifique national ou international et 37.4 % auraient publié dans une revue scientifique révisée par les paires.​ Quant aux activités parascolaires, 58.1 % des patrons et 73.6 % des résidents auraient été impliqués dans une activité en dehors de leurs études.

Les évaluations des stages électifs et celles des stages obligatoires étaient considérées comme ‘’très importantes’’ par 79.7 % et 62.9 % de tous les répondants. Le contenu des lettres de recommandation était considéré ‘’très important’’ par une majorité de répondant (58.8 %), alors que la notoriété de l’auteur ne l’était que dans 25.6 % des cas. Parmi les qualités fondamentales des candidats, le jugement clinique était coté ‘’très important’’ à 90 % alors que les habiletés techniques innées ne l’étaient qu’à 26 %.

Nous avons profité de ce sondage pour questionner les patrons au sujet de leur satisfaction de carrière en fonction de leur spécialité chirurgicale, ainsi que les impacts de leur carrière chirurgicale sur différents aspects de leur vie. Ces résultats sont présentés dans les graphiques 1 et 2.

Conseils pour les étudiants

Plusieurs patrons et résidents ont pris le temps d’écrire des commentaires pour aider à guider les étudiants intéressés par une carrière chirurgicale dans leurs choix de carrière et leurs parcours pré-résidence chirurgicale. Pour permettre aux étudiants d’en bénéficier au maximum, nous vous présentons ci-dessous une compilation exhaustive de ces commentaires.

« 1) Choix de carrière : Je pense que le plus important est de rester ouvert; j’ai découvert mon premier choix de spécialité très tard à l’externat; 6 mois et demi avant d’envoyer mon application. Je pense que si on aborde chaque stage comme étant une potentielle avenue de carrière, on donne notre 100 % et on réalise aussi qu’on ne serait pas heureux dans une seule chose, ce qui rend le processus moins stressant. Le fait de mettre tous nos efforts dans chaque stage fait aussi qu’on a de meilleures évaluations, et si plusieurs programmes écrivent dans nos évaluations qu’on serait un bon candidat pour leur spécialité, cela fait foi d’une excellente capacité d’adaptation aux exigences de milieux divers, et rend la candidature plus intéressante pour un programme, sans qu’on ait eu besoin de devenir un « mini-spécialiste » en faisant tous nos stages ou projets de recherche dans un seul domaine. Cela permet de monter un dossier polyvalent qui donne la chance d’être considéré par plus d’un programme.

2)  Stages à l’externat : J’ai fait des stages dans des milieux réputés pour être exigeants et reconnus. Cela permet d’avoir des lettres de patrons qui siègent sur les comités et cela ouvre des portes. C’est surtout vrai lorsqu’on n’est pas uniquement dirigé vers une seule spécialité; par exemple, j’ai fait 2 semaines de chirurgie colorectale au CHUM et avoir une bonne évaluation et une lettre de recommandation après ce stage m’a permis d’avoir l’entrevue. Si je n’avais pas fait ce stage à cet endroit, je pense que mon intérêt aurait pu ne pas sembler aussi réel (avoir fait 2 semaines seulement de stage à option dans un domaine ne donne pas l’impression que c’est haut dans notre liste, alors qu’il s’agissait ici de mon 2e programme ranké, sur 9 en tout).

3) Application en résidence : Il faut se prendre à l’avance! Demander des lettres de recommandation anticipées aux patrons dès qu’ils nous offrent d’appuyer notre candidature. Je pense qu’il ne faut pas avoir peur d’appliquer dans des domaines diversifiés. Il ne faut pas se retenir d’appliquer dans toutes les spécialités qui nous rendraient heureux.

4) Lettres de recommandation : Il vaut toujours mieux qu’elle vienne d’un patron qui nous connaît bien, ou avec qui on s’est particulièrement entendu. Il vaut également mieux demander la lettre en personne.

5) Attitude en général : Je pense qu’au-delà d’avoir de l’exposition auprès des patrons influents, le plus important est de servir à l’équipe. Il faut connaître ses patients, toujours garder en tête que le but premier est de les aider. Aider les résidents à accomplir des petites tâches est souvent plus profitable à l’équipe que d’aller montrer qu’on sait faire un beau sous-cuticulaire en salle d’op. Dans cette mesure, il faut savoir se rendre utile, être proactif, et donner son 150 % par respect pour les résidents et les patrons qui font de même, et surtout pour les patients. Finalement, comme le temps d’étude est moins grand, il faut savoir maximiser les opportunités d’apprentissage. »

–  R1, ORL et chirurgie cervico-faciale

« Je suis rentré en médecine pour être neurochirurgien, idée romantique basée sur la connaissance brève de Wilder Penfield, mais l’externat m’a fait comprendre autre chose. Hervé Blanchard et Alain Ouimet, chirurgiens pédiatriques à HSJ, m’ont allumé la chandelle pour le défi intellectuelle et le plaisir technique de la maîtrise de techniques de plus en plus évoluées pendant mon stage obligatoire. Garder l’esprit ouvert (dans vos choix de carrières) pendant vos stages; votre motivation et vos Évaluations seront scrutées de près pour y rechercher les qualités de team player, fiabilité sous stress, responsabilité et résilience. »

– Patron, actuellement membre du comité d’admission, Chirurgie orthopédique

« Il est difficile à votre niveau de réaliser les implications sur la vie personnelle de ce genre de spécialités, pas juste le nombre d’heures, mais aussi les fins de semaine, soirs, nuits. On pense que c’est  »bad ass » et qu’on va être capable de passer par-dessus, mais il faut réaliser qu’il ne sera pas possible de tout prioriser. Il y a des moments importants de votre vie que vous allez manquer. Mais je pense que la plupart des gens vous diraient quand même que ça vaille la peine quand on aime vraiment le day-by-day de notre spécialité. »

–  R3, Obstétrique-gynécologie

« Soyez vous même. Ça paraît quand les gens essayent trop. Profitez des occasions sans vous brûler dans les stages (profitez de moments pour étudier et améliorer vos connaissances, sans passer 22h/24 à l’hôpital pour impressionner). Impliquez-vous comme un résident, joignez les activités scientifiques/cours/réunions le matin. N’hésitez pas à demander à changer votre horaire pour vous impliquer davantage avec 1 ou 2 patrons spécifiquement pour qu’il vous reconnaisse(nt) quand vous demandez une lettre de recommandation. »

–  R3, Chirurgie orthopédique

« Il faut se rappeler que la vie consiste en 5 grands thèmes : physique, intellectuel, émotionnel, spirituel et le 5e représente la sommation des quatre précédents. La vie fait que chacun de ces thèmes est variable dans le temps. Il faut malgré tout tenter de maintenir un équilibre. Il faut aussi connaître qui nous sommes pour savoir ce que nous désirons vraiment. La résidence est une période d’apprentissage intense qui a un début et une fin. Il faut en profiter au maximum. »

–  Patron, Chirurgie cardiaque

« La « chirurgie » n’est souvent qu’une combinaison de gestes techniques et occupe une minorité du temps de nos activités. La prise en charge pré et post opératoire ainsi que le suivi à moyen terme est fondamental. Le travail intégré en associant une part « médical » aux simples gestes chirurgicaux est nécessaire pour assurer une diversité. La chirurgie n’est plus une discipline de simples « barbiers ». »

–  Patron, anciennement membre du comité d’admission, Obstétrique-gynécologie

« C’est votre personnalité, votre passion et votre curiosité qui fera la différence. Ensuite, les évaluations et les notes vont suivre. Évitez de faire quelque chose seulement pour « entrer dans le programme ». Faites-le par intérêt parce que si c’est nécessaire de faire quelque chose pour entrer dans le programme c’est parce que vous allez faire ça tout au long de votre programme de résidence.  »

–  R1, ORL et chirurgie cervico-faciale

« Ne vous fiez pas aux gens qui vous diront « de faire des bons stages »; il faut être TRÈS proactif et commencer une implication (i.e. recherche) très tôt, idéalement avant de débuter l’externat. La compétition est élevée (et elle le sera encore plus avec l’augmentation des cohortes et la stagnation des postes en spécialités) et il faut se démarquer. »

–  Patron, Chirurgie plastique

« Il faut savoir démontrer durant ses stages une implication constante, peu importe le domaine du stage, une bonne autonomie et une capacité d’apprentissage, reconnue. De plus, une personnalité agréable qui facilite le travail en équipe (et qui est soulignée) est un élément positif important selon moi. »

–  Patron, actuellement membre du comité d’admission, Chirurgie cardiaque

« L’obstétrique-gynécologie représente une belle spécialité complète. Par ailleurs, je dirais qu’il faut être intéressé et proactif dans les stages. De plus, souvent les externes traitent les résidents avec du mépris/manque d’intérêt. Nous avons une grande part dans la décision.  »

–  R5, Obstétrique-gynécologie

« S’assurer d’être certain de son choix, ne pas choisir tel ou tel domaine car ses amis ou autres font ainsi. C’est un choix qui affectera d’une manière importante le cours de votre vie. La passion doit être présente, sinon c’est impossible d’y arriver! »

–  Patronne, Obstétrique-gynécologie

« Choisir des stages à option dans un milieu réputé. Si possible, sortir du réseau de l’UdM pour un stage, mais garder les autres dans des milieux où des gens influents auront la chance de les connaître. Bien se préparer aux entrevues. »

–  Patronne, anciennement membre du comité d’admission, Chirurgie générale

« Devrait être passionné par la profession et pas être seulement attiré par le prestige ou « glamour » de la spécialité. Ce sont des spécialistes qui en donnent plus qui en reçoivent. Il faut être prêt à faire certains sacrifices. »

–  Fellow, Chirurgie générale

« Faire des stages dans les milieux qui offrent un poste à l’année d’application est un atout important pour se faire connaître et apprécier. Permets aussi d’avoir des opportunités de projets de recherche locaux. »

–  Patronne, actuellement membre du comité d’admission, Neurochirurgie

« Implication importante dans le milieu à l’externat, mais il est tout à fait accepté et recommandé d’aller explorer les autres possibilités de spécialités pour être certain que vous faites le bon choix au final. »

 –  Patronne, anciennement membre du comité d’admission, Chirurgie orthopédique

« Faut que ce soit une passion, faut être résilient, faut pas que ce soit l’argent la principale motivation, faut avoir du leadership, faut avoir introspection et vouloir s’améliorer constamment. »

–  Patronne, Obstétrique-gynécologie

« JOURNÉES D’OBSERVATIONS!!! Ça commence toujours toujours toujours là… Le plus tôt vous en faites le plus vite vous êtes capable de voir si le programme/spécialité est pour vous ou non. »

–  R4, ORL et chirurgie cervico-faciale

« Avoir un 2e choix, car c’est très contingenté. S’assurer de s’appliquer dans tous ses stages d’externat, car chacun des stages compte au final et a de l’impact sur le classement. »

–  R4, Obstétrique-gynécologie

« Important de se faire connaître auprès des résidents du programme. Ils sont en contact étroit avec les externes et ont un poids décisionnel dans le comité d’admission. »

–  R3, Chirurgie orthopédique

« Se faire connaître par un stage clinique lors de l’externat est une excellente façon de se faire connaître. Ne pas seulement appliquer dans un programme au Québec.  »

–  Patron, anciennement membre du comité d’admission, Urologie

« Soyez vous même. Vous n’avez pas besoin d’aller au camp de base de l’Everest pour être dans une spécialité chirurgicale. L’authenticité est importante.  »

–  Patronne, actuellement membre du comité d’admission, Obstétrique-gynécologie

« Se faire connaître est un élément important à mon avis… Une bonne performance à l’externat durant les stages obligatoires est primordiale également.  »

–  Patronne, Obstétrique-gynécologie

« Être professionnel/gentil avec TOUT le personnel, pas seulement envers les résidents ou patrons de la spécialité chirurgicale convoitée!  »

–  R2, ORL et chirurgie cervico-faciale

« Avoir l’endurance physique. Avoir une tolérance à un horaire parfois imprévisible. Avoir la capacité et la volonté du travail en équipe. »

–  Patron, Chirurgie générale

« Essayez d’identifier des mentors patrons ou résidents assez tôt pour vous guider dans votre choix et dans le processus de sélection. »

–  R5, Urologie

« Faites vous connaître; venez au congrès québécois ou canadien, parlez aux résidents, faites le plus de stages à option possible. »

–  Patronne, Chirurgie plastique

« Être conscient qu’une résidence en chirurgie aura des répercussions sur toutes les sphères de leur vie. On doit être passionné. »

–  R5, Chirurgie générale

« Choisir la spécialité que l’on va aimer autant après 25 ans qu’au début. Ne rien choisir par défi ou en imitant d’autres. »

 –  Patron, anciennement membre du comité d’admission, Chirurgie cardiaque

« Aucun dérapage à l’externat; mieux vaut être moyen/bon tout le temps qu’occasionnellement brillant, mais moche parfois. »

–  Patron, anciennement membre du comité d’admission, ORL et chirurgie cervico-faciale

« Une excellente forme physique, une grande capacité d’adaptation et des qualités de communication sont essentielles. »

–  Patronne, anciennement membre du comité d’admission, Chirurgie orthopédique

« Être une personne avec qui c’est un plaisir travailler. Être gentil et travaillant même quand vous êtes stressé! »

–  R3, Chirurgie générale

« Faire des stages de chirurgie en milieu communautaire afin d’augmenter son exposition et sa participation. »

–  Fellow, Chirurgie générale

« La meilleure spécialité chirurgicale en terme de vie professionnelle et familiale est l’urologie. »

–  Patron, anciennement membre du comité d’admission, Urologie

« Impliquez-vous auprès des résidents comme si vous êtes un membre de l’équipe à part entière. » –  R1, Chirurgie orthopédique
« Faites-vous connaître, mais tout en respectant votre place et ne pas être trop envahissant. »

–  R1, Urologie

« Être motivé, disponible, travailleur, intelligent et tolérant au stress. »

–  Patron, Chirurgie générale

« Je crois que l’important c’est d’avoir la passion et que ça paraisse.  »

–  Patronne, anciennement membre du comité d’admission, Chirurgie générale

« Engagement dans la profession. Il s’agit d’un mode de vie spécial.  »

–  Patron, actuellement membre du comité d’admission, Chirurgie générale

« Si ça vous attire, ne pas hésiter… La plus belle job au monde! »

–  Patron, anciennement membre du comité d’admission, Chirurgie générale

« Altruisme, humanité, culture générale et ouverture d’esprit. »

–  Patron, anciennement membre du comité d’admission, Neurochirurgie

« Persévérance, garder le contrôle, contrôler son stress. »

–  Patronne, Chirurgie générale

« Bien choisir les stages et montrer de l’intérêt. »

–  Patron, anciennement membre du comité d’admission, Chirurgie cardiaque

« Faire des stages en milieu de demande. »

–  Patron, actuellement membre du comité d’admission, ORL et chirurgie cervico-faciale

Merci aux nombreux membres du département de chirurgie qui ont participé à ce projet,

Yann Beaulieu, Xiya Ma, Ariane Smith, Louis Guertin, Madeleine Poirier, Margaret Henri