Ma passion pour la chirurgie et l’importance que je chérie pour l’entraide internationale m’ont porté jusqu’à Jacmel, une ville du Sud-Est d’Haïti, en octobre dernier. J’ai eu l’immense privilège de prendre part à une mission humanitaire chirurgicale au sein d’une équipe exceptionnelle du CHU Sainte-Justine, chapeautée par la chirurgienne Dre Louise Caouette-Laberge. Le texte qui suit vous raconte mon expérience globale, expose mes réflexions face à l’aide humanitaire et met l’emphase sur la primordialité de reconnaître que nous avons tous un rôle à jouer dans ce partenariat.
Ayant déjà participé à quelques occasions à des voyages à visées d’enseignement et de transferts de connaissances, je ne m’attendais pas à être énormément déstabilisée par un nouvel environnement, une culture différente, des valeurs changeantes. J’avais tort. Ce qui m’a particulièrement touchée, c’est le contraste évident du partage des ressources. Tantôt le manque d’eau s’avère flagrant dans les rues, tantôt elle coule sur les murs d’un hôtel en guise de décoration. Cette eau qui ne coule d’ailleurs plus dans les canaux qui traversent la ville, ceux-ci étant complètement bouchés par les rebuts. Je me suis ainsi longuement questionnée par rapport à ce manque de gestion adéquate des déchets pendant la mission, m’interrogeant sur l’empreinte écologique que nous laisserions à notre départ. C’est une réalité : les groupes humanitaires laissent souvent leur trace sur le sol des pays hôtes. Garder en tête ce principe nous permet de minimiser cet impact environnemental, afin que l’aide apportée soit entièrement bénéfique pour la population locale et ce, à tous les niveaux. Malgré la pauvreté, j’ai pu témoigner d’un doux bonheur, partagé par un peuple qui prend le temps d’apprécier la vie et de cultiver son univers religieux et spirituel.
La chirurgie à l’Hôpital Saint-Michel de Jacmel, c’est être exposé à une toute autre facette de cette spécialité. C’est des bâtiments sécuritaires à l’épreuve des catastrophes naturelles, mais dont le financement manque pour les faire fonctionner. C’est trois salles opératoires équipées, sans qu’il n’y ait suffisamment de personnel compétent pour les mettre au profit des patients. C’est des dons internationaux généreux de matériel chirurgical et d’anesthésie, sans qu’il n’y ait d’organisation efficace de leur rangement, afin d’optimiser leur utilisation. C’est une équipe motivée à apprendre, afin que l’octroi des soins chirurgicaux soient accessibles à la population haïtienne malgré une précarité évidente. C’est une diversité des cas cliniques et chirurgicaux. C’est le partage des connaissances avec les chirurgiens, l’équipe d’anesthésie et les infirmières. C’est surtout et avant tout un magnifique témoignage soulignant qu’un travail d’équipe, malgré des ressources limitées, peut engendrer de grandes réussites. Bref, c’est une occasion d’ouverture sur le monde unique que je recommande fortement à tous mes collègues.
Les actions bénévoles internationales comportent parfois des bémols. Souvent, ces groupes toutefois bien intentionnés agissent principalement en solo, n’impliquant pas le personnel local, ou très peu. C’est dans une optique différente que le CHU Sainte-Justine et le département de chirurgie de l’Université de Montréal s’engagent à l’Hôpital Saint-Michel. En effet, l’objectif principal des missions est d’épauler les partenaires locaux, afin de renforcer les compétences des équipes, dont les membres sont engagés dans un processus de perfectionnement. L’écoute des besoins est primordiale et c’est dans cet ordre d’idées que l’amélioration de la qualité et de la sécurité des interventions chirurgicales a été réalisée en octobre dernier.
En somme, mon séjour en Haïti fut plus qu’instructif. J’y ai découvert une équipe médicale fantastique qui œuvre depuis maintenant 10 ans à redonner le sourire aux enfants de divers pays en voie de développement et à leur permettre de se nourrir adéquatement et d’accroître leur estime d’eux-mêmes, par l’entremise de chirurgies correctrices de fentes labiopalatines. Je tiens à remercier la Faculté de médecine de l’Université de Montréal pour leur flexibilité et leur précieuse collaboration dans ce processus divergeant de la norme. Il a suffi de quelques échanges de courriels et d’une présentation de mon projet au comité approprié et mon billet d’avion était imprimé.
J’espère vous avoir transmis ma ferveur et donner le goût de participer à de tels projets. Je suis reconnaissante des enrichissements fondamentaux que j’ai pu en retirer, tant humains qu’académiques. La possibilité de vous impliquer à l’international est à votre portée, qui sera le prochain?
Léamarie Meloche-Dumas
Externe 2, Faculté de médecine
Université de Montréal